Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le bar à poèmes
14 mai 2016

Guillaume Apollinaire (1880 -1918) : A la Santé

Portrait+of+Guillaume+Apollinaire[1]Peint par Maurice de Vlaminck

 

A la Santé

I

Avant d’entrer dans ma cellule

Il a fallu me mettre nu

Et quelle voix sinistre ulule

Guillaume qu’es-tu devenu

 

Le Lazare entrant dans la tombe

Au lieu d’en sortir comme il fit

Adieu adieu chantante ronde

Ô mes années ô jeunes filles

II

Non je ne me sens plus là

          Moi-même

Je suis le quinze de la

          Onzième

 

Le soleil filtre à travers

          Les vitres

Ses rayons font sur mes vers

          Les pitres

 

Et dansent sur le papier

          J’écoute

Quelqu’un qui frappe du pied

          La voûte

III

Dans une fosse comme un ours

Chaque matin je me promène

Tournons tournons tournons toujours

Le ciel est bleu comme une chaîne

Dans une fosse comme un ours

Chaque matin je me promène

 

Dans la cellule d’à côté

On y fait couler la fontaine

Avec les clefs qu’il fait tinter

Que le geôlier aille et revienne

Dans la cellule d’à côté

On y fait couler la fontaine

IV

Que je m’ennuie entre ces murs tout nus

          Et peint de couleurs pâles

Une mouche sur le papier à pas menus

          Parcourt mes lignes inégales

 

Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur

          Toi qui me l’as donnée

Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
 

         Le bruit de ma chaise enchainée

 

Et tour ces pauvres coeurs battant dans la prison

          L’Amour qui m’accompagne

Prends en pitié surtout ma débile raison

          Et ce désespoir qui la gagne

V

 

Que lentement passent les heures

Comme passe un enterrement

 

Tu pleureras l’heure ou tu pleures

Qui passera trop vitement

Comme passent toutes les heures

VI

J’écoute les bruits de la ville

Et prisonnier sans horizon

Je ne vois rien qu’un ciel hostile

Et les murs nus de ma prison

 

Le jour s’en va voici que brûle

Une lampe dans la prison

Nous sommes seuls dans ma cellule

Belle clarté Chère raison

(7- 11 septembre 1911)

Alcools,

Editions du Mercure de France,1913 

Du même auteur :

Les Colchiques (14/05/2014) 

Le pont Mirabeau (14/05/2015) 

Si je mourais là-bas (14/05/2017)

Vitam impendere amori (01/05/2018)

Départ (01/05/2019)

Corps de chasse (01/05/2020) 

La victoire (01/05/2021)

l’Ignorance (01/05/2022)

l’Adieu (01/05/2023)

Publicité
Publicité
Commentaires
Le bar à poèmes
Publicité
Archives
Newsletter
96 abonnés
Publicité