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Le bar à poèmes
25 novembre 2023

William Butler Yeats (1865 - 1939) : Les cygnes sauvages à Coole / The wild swans at Coole

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Les cygnes sauvages à Coole

 

Les arbres ont leur beauté d’automne,

Les sentiers du sous-bois sont secs.

Dans le crépuscule d’octobre l’eau

Reflète un ciel tranquille ;

Sur cette eau où affleurent les pierres

Cinquante-neuf cygnes sont là.

 

Le dix-neuvième automne est arrivé

Depuis mon premier décompte ;

Je les ai vus, avant même d’avoir fini,

Monter d’un coup, tous ensemble,

Et se disperser en grands cercles brisés

Sur leurs ailes si sonores.

 

J’ai regardé ces êtres si lumineux,

Et mon cœur est douloureux maintenant.

Tout a changé depuis, qu’au crépuscule,

Entendant pour la première fois sur ce rivage,

Battre leurs ailes comme des cloches,

Au-dessus de ma tête,

Je marchais d’un pas plus léger.

 

Vigoureux encor, et par couples d’amants

Ils brassent les courants froids mais propices

Ou escaladent l’air ;

Leurs cœurs n’ont pas vieilli

La conquête ou la passion, quelle que soit leur errance,

Sont toujours avec eux.

 

Mais pour l’heure, ils dérivent sur l’eau calme,

Mystérieux et beaux.

Dans quels joncs feront-ils leurs nids,

Près de quel lac, quel étang

Réjouiront-ils notre regard, jusqu’au jour où,

A mon réveil, je comprendrai qu’ils sont partis

 

 

Traduit de l’anglais par Jean Orizet

In, revue « Poésie 1, N° 33, mars 2003 »

Le cherche midi éditeur, 2003

 

Les cygnes sauvages à Coole

 

Les arbres, les voici dans leur beauté d’automne,

A travers bois les chemins sont secs,

Sous le crépuscule d’octobre les eaux

Reflètent un ciel tranquille ;

Sur les hautes eaux, passant entre les pierres

Vont les cygnes, cinquante et neuf.

 

Le dix-neuvième automne est descendu sur moi

Depuis que je les ai comptés pour la première fois ;

Je les vis, avant d’en avoir pu en finir le compte,

Qui s’élevaient soudain

Ils s’égayaient en tournoyant en grands cercles brisés

Sur leurs ailes tumultueuses.

 

J’ai contemplé ces créatures brillantes

Et maintenant mon cœur est douloureux.

Tout a changé depuis, qu’au crépuscule,

Pour la première fois, sur ce rivage,

A entendre le carillon de leurs ailes au-dessus de ma tête

Je marchais d’une marche plus légère.

 

Toujours sans se lasser, en couples d’amants,

Ils rament dans les froids,

Les complices courants, ou grimpent dans les airs ;

Leurs cœurs n’ont pas vieilli ;

Passions ou conquêtes, où qu’ils partent errer,

Leur font toujours escorte.

 

Mais maintenant ils glissent sur les eaux tranquilles,

Mystérieux et pleins de beauté ;

Parmi quels joncs feront-ils leur nid,

Sur la rive de quel lac, de quel étang

Raviront-ils d’autres yeux lorsque je m’éveillerai

Et trouverai, un jour, qu’ils se sont envolés ?

 

Traduit de l’anglais par Jean-Yves Masson

In, « Anthologie bilingue de la poésie anglaise »

Editions Gallimard, (La Pléiade), 2005

Du même auteur : L’île du lac d’Innisfree / The lake isle of Innisfree (30/10/2018)

 

 

The wild swans at Coole

 

The trees are in their autumn beauty,

The woodland paths are dry,

Under the October twilight the water 

Mirrors a still sky ;

Upon the brimming water among the stones                      

Are nine and fifty swans.               

 

The nineteenth Autumn has come upon me               

Since I first made my count;

I saw, before I had well finished,               

All suddenly mount               

And scatter wheeling in great broken rings               

Upon their clamorous wings.               

 

I have looked upon those brilliant creatures,               

And now my heart is sore.               

All's changed since I, hearing at twilight,      

 The first time on this shore,               

The bell-beat of their wings above my head,               

Trod with a lighter tread.               

 

Unwearied still, lover by lover,     

 They paddle in the cold,               

Companionable streams or climb the air ;       

Their hearts have not grown old ;               

Passion or conquest, wander where they will,               

Attend upon them still.               

 

But now they drift on the still water               

Mysterious, beautiful ;               

Among what rushes will they build,  

By what lake's edge or pool

Delight men's eyes, when I awake some day               

To find they have flown away?

 

 

The wild swans at Coole

The Little Review, June 1917, Chicago (USA)

Poème précédent en anglais :

Allen Ginsberg : Kaddish II (1) (25/10/2023)

Poème suivant en anglais :

Sylvia Plath : Traversée / Crossing the water (03/12/2023)

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