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Le bar à poèmes
28 novembre 2016

Wolfdietrich Schnurre (1920 – 1989) : Messages clandestins, poèmes 1945 – 1956 / Kassiber, gedichte 1945 – 1956 (II)

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Messages clandestins

 

.......................................................

LE SOIR

Jaune tressaille le loriot

dans les perchis

du sommeil.

 

La colonne des moucherons

se rouille ;

le temple des hêtres

s’écroule.

En grande hâte

la pâle troupe

des pèlerins-champignons

se précipite sur

les grains de chapelet

de la rosée.

 

Le pivert noir

à coups de marteau fixe au chêne

le crépuscule.

 

STANCE

 

Quand le faucon

planta sa griffe dans la chair

de la colombe,

un plume tomba

sur la bouche du monde.

Elle resta suspendue, immobile,

aux lèvres desséchées

et attendit le souffle.

Il ne vint pas ;

ce fut le vent du soir

qui l’emporta.

 

LAC GRUNEWALD, LA NUIT

Décoloré le ruban du chemin ;

jaune, il luisait encore

il y a un instant.

Les pins, eux aussi, ont été

absorbés, effacés

par le buvard de la nuit.

Blotti dans la soie, dans la ouate

le cri des bêtes ;

seuls les rires

de l’autre côté du lac

volent encore sur les couteaux

 

TERRE DE CENDRES

Et de nouveau, gris et jaunes, s’élèvent

les nuages d’une poussière traversée d’ordres aboyés ;

les vautours de marbre se sont remis de leur chute

et s’étirent sur les estrades.

Les mille meurtres d’hirondelles restent inexpiés ;

le vent d’automne, qui cherchait le repentir, est venu en vain.

 

CHANSON EN L’HONNEUR D’AHASVERUS

Tu as frappé, Seigneur,

tu es tout trempé ;

les pluies de ce monde

ne te veulent pas de bien.

 

Je sais un toit ;

mais dans les combles

pourrit le bolet.

 

Tu as gémi, Seigneur,

tu es épuisé ;

les chiens de ce monde

ne te veulent pas de bien.

 

Je sais un lit ;

mais dans la balle

se cache une épine.

 

Tu as faim, Seigneur,

tu as déjà de la fièvre ;

les moulins de ce monde

ne te veulent pas de bien.

 

Je sais un pain ;

mais au cœur de la pâte

fermente la mort.

 

Tu as soif, Seigneur,

tu es desséché ;

les puits de ce monde

ne te veulent pas de bien.

 

Je sais un tonneau ;

mais tout au fond

suppure la haine.

 

J’ai honte, Seigneur :

je vis encore ;

les sbires de ce monde

me voulaient trop de bien.

 

Je sais un cœur

qui t’aurait accueilli

s’il n’était pas aussi

coupable.

 

MESSAGE CLANDESTIN

 

Je me refuse

à baiser les pieds du pouvoir ;

la terre a toujours baisé les miens.

 

Je me refuse

à exiger la mort de l’ennemi ;

Je ne suis pas un ennemi, je n’en ai point.

 

SERMENT

Et cependant :

quand de nouveau sur le gibet

sonneront les cages thoraciques de nos frères

dont l’elfe a dévoré les cœurs,

j’irai chercher aussi

mes ailes de vampire

dans le grenier,

puis je m’aiguiserai les griffes

et sortirai à la nouvelle lune

pour voler vers le château-fort,

où ils habitent,

les adorateurs de la mèche,

les seigneurs habillés de cuir.

Je saisirai la chevelure d’or

de leurs maîtresses

et je l’attacherai

aux chandeliers à sept branches de l’offense.

Et puis je sucerai leur sang,

sang de porc et sang de loup,

et je cracherai sur de la chaux,

où il deviendra écriture

et formera le mot.

Non pas : impassibilité.

Non pas : intolérance.

Vengeance.

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Traduit de l’allemand par Raoul Bécousse

In, Wolfdietrich Schnurre «  Messages clandestins,

et nouveaux poèmes »

Editions Noah, 1986

Du même auteur :

Adoration /Anbetung (28/11/2014) 

Messages clandestins, poèmes 1945 – 1956 / Kassiber, gedichte 1945 – 1956 (I) (28/11/2015)

Messages clandestins, poèmes 1945 – 1956 / Kassiber, gedichte 1945 – 1956 (III) (28/11/2017)

Harangue du policier de banlieue pendant sa ronde du matin /Ansprache des vorortpolizisten waehrend der morgenrunde (28/11/2018)

Messages clandestins, poèmes 1945 – 1956 / Kassiber, gedichte 1945 – 1956 (IV) (28/11/2019)

Nouveaux poèmes 1965 – 1979 (III) / Neue Gedichte 1965 – 1979 (III) (28/11/2020) 

Nouveaux poèmes 1965 – 1979 (I) / Neue Gedichte 1965 – 1979 (I) (28/11/2021)

Nouveaux poèmes 1965 – 1979 (II) / Neue Gedichte 1965 – 1979 (II) (28/11/2022)

Nouveaux poèmes 1965 – 1979 (IV) / Neue Gedichte 1965 – 1979 (IV) (28/11/2023)

 

 

Kassiber

 

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ABENS

Gelb zuckt der Pirol

ins Gestänge

des Schlafs.

 

Die Mückensäule

wir rostig ;

der Buchentempel

zerfällt.

Hastig stürzt sich

die bleiche

Pilzpilgerschar

auf die

Rozenkranzperlen

des Taus.

 

An die Eiche

hämmert der Schwarzspecht

die Dämmerung fest.

 

STROPHE

Als der Falke

der Taube

die Fänge ins Fleisch schlug,

sank eine Feder

der Welt auf den Mund.

Reglos hing sie

an den dörrenden Lippen

und harrte des Atems.

Er kam nicht ; es

war der Abendwind,

der sie fortnahm.

 

GRUNEWALDSEE NACHTS

Verwaschen das Wegband ;

gelb hat es

noch eben geleuchtet.

Die Kiefern, auch sie

aufgesogen, verwischt

vom Löschblatt der Nacht.

In Seide, in Watte

der Tierruf ;

nur das Gelächter

jenseits der Sees

fliegt noch auf Messern.

 

ASCHENLAND

Und wieder branden grau und gelb

die Wolken auf befehlsdurchbellten Staubs ;

die Marmogeier haben sich von ihrem Sturz erholt

und recker sich auf den Podesten.

Die tausend Schwalbenmorde bleiben ungesühnt ;

der Herbstwind, der die Reue suchte, kam umsonst.

 

LIED, AUF AHASVER ZU SINGEN

Du klopftest, Herr,

du bich durchnässt ;

die Regen dieser Welt

sie wollen dir nicht wohl.

 

Ich weiss ein Dach ;

doch hoch am First,

da fault der Schwamm.

 

Du ächztest, Herr,

du bist erschöpft ;

die Hunde dieser Welt,

sie wollen dir nicht wohl.

 

Ich weiss ein Bett ;

doch in der Spreu,

da steckt ein Dorn.

 

Dich hungert, Herr,

du fieberst schon ;

die Mühlen dieser Welt,

sie wollen dir nicht wohl.

 

Ich weiss ein Brot ;

doch tief +im Teig,

du gärt der Tod.

 

Dich dürsted, Herr,

du bist verdorrt ;

die Brunnen dieser Welt,

sie wollen dir nicht wohl.

 

Ich weiss ein Fass ;

doch ganz am Grund,

da schwärt der Hass.

 

Ich schäm mich, Herr,

ich lebe noch ;

die Schergen dieser Welt,

sie wollten mir zu wohl.

 

Ich weiss ein, Herz,

das liess dich ein,

wärs nich so voll

von Schuld.

 

KASSIBER

Ich weigere mich,

den Schuh der Macht zu küssen;

die Erde küsste stets den meinen.

 

Ich weigere mich,

den Tod des Feinds zu müssen;

ich bin kein Feind, ich habe keinen.

 

SCHWUR

Und doch :

Wenn wieder am Galgen

die Brustkörbe läuten der Brüder,

deren Herzen der Alb ass,

werde auch ich

meine Vampirschwingen

vom Dachboden holen,

die Krallen mir schärfen

und ausziehn bei Neumond

und fliegen zu Burg,

wo sie wohnen,

die Stirnlockenanbeter,

die Herren aus Leder.

Und ihren Mätressen ins Goldhaar

werde ich fahren

und es festbinden am

siebenarmingen Leuchter der Schuld.

Und Blut werde ich saugen,

Schweinsblut und Wolfsblut

und es speien auf Kalk,

wo es zu Schrift wird,

wo es das Wort formt.

Nicht : Gleichmut.

Nicht : Toleranz.

Rache.

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Kassiber und neue Gedichte,

Ullstein Buch, Berlin, 1979 et 1982

Poème précédent en allemand :

Rainer – Maria Rilke : Soir en Scanie / Abend in Skåne (23/11/2016)

Poème suivant en allemand :

Paul Celan : Matière de Bretagne (01/12/2016)

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