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Le bar à poèmes
17 octobre 2022

Jacques Lovichi (1937 – 2018) : Signoria

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Signoria

 

à Christiane Baroche

qui sait,

quelques plaisirs amers...

 

I

Pluies.

Sous son arche déshabitée

le fleuve roule un limon jaune

et dans les glaces opportunes

un passé possible

grimace.

 

II

Un peu de patience

encore

un peu de

cendre      sur la vitre

engluée    de l’aube immédiate

Un peu de sang

au centre

de la plaque

une longue fêlure noire

comme un grincement dans les moelles

 

Voici venir

l’irrémédiable.

pour Michel Dugué

 

III

Vertèbre hérissée de prestiges

claque dans l’épaisseur du cri

Lueur

sous de la nuit soudain moins noire :

vertige irisé des ténèbres

Dire juste le tremblement

des moires

là où s’épand le verbe tu.

à Jean-Marie Tixier

 

IV

Et ce n’est pas la douleur

cela

juste une flamme qui vacille

sous le souffle froid de l’hiver

moins :

une perle de gel à la pointe d’une herbe

moins encore :

un incertain reflet

dans l’œil ou dans la vitre.

à Notre-Dame-du Boulevard

 

V

L’ultime lueur

là-bas

de l’autre côté du fleuve

en quelque crypte désertée

charbonne

grésille

et

meurt

larme cireuse et nue des agonies de l’aube.

à Jeannine R.

 

VI

Lion

régnant

sur l’étendue rugueuse

des linges essorés

 

Ferrugineux

suinte

au bord de la paupière

le juste contrepoids du désir engravé :

C’est

talion.

pour Alain Borer

 

VII

La métaphore

hélas

n’est pas de mise

Obscur cheminement de l’instant dans le fleuve :

L’homme

nu.

 

VIIII

Plazzale Michelangelo

les ombres courent sur la ville

océan des cloches

soudain

Dire juste le tremblement

cette fêlure dans la vitre

la pluie de cendres sans oubli :

Un autre jour

meurt.

à Bernard Mazo

 

IX

Harpes désaccordées

comme

un enfant qui pleure

(et c’est encore un autre jour)

un peu de patience

un peu

de

patience

un

peu

de

 

X

Ô chant gordien

délices pures

de l’implacable adolescent

Là-bas

sur l’autre bord du fleuve

tapi     le gardien

aux trois

têtes :

il faut

trancher

 

XI

Sous l’arcade désaccouplée

rugissement de nos désirs

un souffle

un coup d’archet

une plainte crépusculaire

le

jour

agonise

mélo

dieu

se

ment.

 

XII

Dernier acte du mélodrame

banal

et pourtant

l’engoulevent crie dans les feuilles

sur le bord du fleuve scintille

la luciole des jours enfuis

il

pleut

de la mort douce sous les arbres :

indéchiffrable

seigneurie

de

l’instant.

 

Fiesole, La Ciotat, novembre 1985

 

 

Les derniers retranchements. Poèmes

Le cherche-midi éditeur, 2002

Du même auteur :

La sourde oreille (17/10/2014)

Ne variatur ou l’avant-dernière lettre d’Ephèse (17/10/2015)

Le combat avec l’ange (17/10/2016)

Mourir dans l’île (17/10/2017)

Mort du sultan des Asphodèles (17/10/2018)

Luberons (16/10/2019)

Jardin (17/10/2020)

Bégo ou le Sorcier des Merveilles (17/10/2021)

Promontoire (17/10/2023)

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