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Le bar à poèmes
4 octobre 2022

Claudio Rodríguez (1934 -1999) : Comme le bruissement des feuilles du peuplier / « El dolor verdadero no hace ruido... »

El_poeta_Claudio_Rodríguez[1]

 

Comme le bruissement des feuilles du peuplier

 

     La vraie douleur ne fait pas de bruit :

elle laisse comme un bruissement de feuilles

de peuplier agitées par le vent,

une rumeur intime, d’une vibration

si profonde, si sensible au moindre frôlement,

qu’elle peut devenir solitude, discorde,

injustice ou dépit. Je suis là à écouter

ses murmures qui, loin de troubler,

sont porteurs d’harmonie, si effilés

et subtils, avec un tel son de spacieuse

sérénité en cette fin d’après-midi,

qu’ils sont presque sagesse douloureuse,

résignation pure. Trahison qui est venue

d’un mauvais conseil de la bouche flétrie

de la jalousie. C’est égal. Je suis là à écouter

ce qui me contraint et m’enrichit, au prix

de blessures qui suppurent encore. Douleur que j’entends

avec grand recueillement, comme le frémissement

d’un feuillage, sans chercher ni signes, ni mots

ni sens. Musique seule,

sans énigmes, murmures solitaires qui transpercent

mon cœur, douleur qui est ma victoire.

 

Traduit de l’espagnol par Claude de Frayssinet

In, « Poésie espagnole, Anthologie 1945 – 1990 »

Actes Sud / Editions Unesco, 1995

Du même auteur :

Parce que nous ne possédons rien / Porque no poseemos (04/10/2018)

Don de l’ivresse / Don de la ebriedad (04/10/2019)

Etranger / Ajeno (04/10/2020)

 L’embauche des gamins / « Qué estáis haciendo aquí?.. » (04/10/2021)

 Gestes / Gestos (04/10/2023)

 

 

 

El dolor verdadero no hace ruido.

Deja un susurro como el de las hojas

del álamo mecidas por el viento,

un rumor entrañable, de tan honda

vibración, tan sensible al menor roce,

que puede hacerse soledad, discordia,

injusticia o despecho. Estoy oyendo

su murmurado son que no alborota

sino que da armonía, tan buido

y sutil, tan timbrado de espaciosa

serenidad, en medio de esta tarde,

que casi es ya cordura dolorosa,

pura resignación. Traición que vino

de un ruin consejo de la seca boca

de la envidia. Es lo mismo. Estoy oyendo

lo que me obliga y me enriquece a costa

de heridas que aún supuran. Dolor que oigo

muy recogidamente como a fronda

mecida sin buscar señas, palabras

o significación. Música sola,

sin enigmas, son solo que traspasa

mi corazón, dolor que es mi victoria.

 

Alianza y condena

Ediciones de la Revista de Occidente, Madrid, 1965

Poème précédent en espagnol :

Carlos Edmundo de Ory : « Il semble que l’homme souffre... » / « Parece ser que el hombre sufre... »

Poème suivant en espagnol :

Monica Mansour: « Je veux écrire des mots d’oiseaux... » / « quiero escribir palabras de ave... » (07/10/2022)

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