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Le bar à poèmes
19 mars 2021

André Markowicz (1960 -) : « Laisse ton adresse... »

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Laisse ton adresse, dit en rêve,

dans le train de nuit où tu somnoles,

l’ombre qui se fond, tournant le buste

en parlant, si bien que ce qui sonne

te parvient issu non de sa bouche

mais du glissement de son absence

vers une autre image et si, le pauvre,

tu te dis qu’il s’est ouvert les veines

loin, en Italie, sans que tu saches

ni pourquoi ni quand, par la brûlure

que tu sens soudain au poignet gauche,

outre la douleur fantôme, reste

cette voix autour lointaine et proche

qui te sort déjà d’une autre scène,

de miroitements sur l’eau dormante

vert-de-gris opaque, jaune et rouge,

sur lesquels la barque oscille et berce,

et, dans le halo des deux images

qui se superposent, tu n’existes,

en ouvrant les yeux une seconde

pour les refermer et voir si quelque

bribe permettrait de vivre encore

avec elle quand tu te réveilles,

plus que pour te voir en réceptacle

de son geste, te parler, la tête

vers l’arrière, pas vers toi,  - un timbre

grave et de fausset ensemble,

comme à portée des mains, qui se dissipe

dès que tu l’entends – et quelle adresse

lui laisserais-tu qu’il n’ait déjà ?

 

17 nov. 14

 

Revue « Babel heureuse N° 3, printemps 2018 »

Gwen Catalá, éditeur, 31000 Toulouse

Du même auteur :

Trois aubes (19/03/2019)

Trois textes d’un été (19/03/2020)

« Une chute lente... » (18/03/2022)

« Un sommeil haché... » (19/03/2023)

« Car le visage est... » (19/03/2024)

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