Marc Le Gros (1947 -) : Rouge-gorge
Rouge-gorge
Ce n’est pas tellement le paysage
Qui revient
Mais l’air d’avant aux pensées légères
Aux mots très doux
Qu’on disait
Pour dire quelque chose peut-être
Qu’auraient entendu les oiseaux
Trois fois rien
Des images
Mais frustres alors sans art
Comme celle des petits livres d’autrefois
Et c’est un gué qu’on passe sans savoir
dans l’éblouissement ordinaire
Du jour
Un vieil homme au jardin
Un peu flottant déjà
Dans ce bleu
Trop large ratatiné de crasse
Aussi luisant que le manche de la bêche
Dans la poche près du couteau
Le grand mouchoir à carreaux mauves
Fait une bosse
Et le rouge-gorge
Sur son perchoir bas
Comme moi fait semblant
De regarder ailleurs
Quand il pisse longuement contre la haie
C’est la terre du matin
Fumante et belle
Lucide
Une coquille d’huître parfois remonte
Qui ne se souvient de rien
On a l’amitié du temps
La poésie est invisible
Février 90
Le Nouvel Ecriterres, N° 2, Mai 1990
29720 Plonéour-Lanvern
Du même auteur : Cigüeña (25/01/2019)