Pablo García Baena (1923 -) : Quand les messagers… / Cuando los mensajeros…
Quand les messagers…
Quand les messagers frapperont aux volets
et que leurs voix, à travers le bois vermoulu,
pénétrera tel un vent de musique et d’argent,
ô cœur, ne crains rien, ne tremble pas, mon amour.
Un souffle de destin éteindra la flamme entre les lèvres
et dans les barques de l’été les rameurs fleuris se tairont
à jamais.
La main, sur les cordes de quelque noble instrument,
demeurera, et la chanson, oiseau inachevé,
cherchera son nid dans les gemmes brillantes et solitaires
des corps nus, polis par le souffle de la mer et des astres,
calmes et éclatants comme des arbres faits de marbre
où un fruit doux et empoisonné pourrit lentement.
Seront ensevelis dans des champs d’oubli
la balance subtile de l’orfèvre et la boussole
qui guide en rêve la flotte mystérieuse,
et le lutrin et les bâtons, le fouet et les harnois,
silencieux témoins de quelque ombre défunte.
Et le rubis comme une dent de sang clouée dans la gorge,
et le verre qui répand le sortilège du vin,
et le bracelet bleu comme la pampre d’or enroulé à la chair,
le poinçon et les jarres.
Ce qui un jour posséda le feu d’un instant,
éternité proclame.
Ô cœur, ô amour, mon amour qui trembles
solitaire aux murmures de la forêt qui respire,
ne crains rien.
Les portes au triple cadenas sont fermées
et la vie court encore sur mes mains. Dors doucement
jusqu’à ce qu’une aube pourpre scelle de poussière la lèvre
et nous emmène en flottant jusqu’aux trônes cérémoniels.
Traduit de l’espagnol par Claude de Frayssinet
In, «Poésie espagnole, Anthologie 1945 – 1990 »
Actes Sud / Editions Unesco, 1995
Du même auteur :
Seul ton amour et l’eau… / Sólo tu amor y el agua... (27/04/2015)
Juin / Junio (27/04/2016)
Enfant de chœur (27/04/2018)
Cuando los mensajeros…
Cuando los mensajeros golpeen los postigos
y su voz, a través de la vieja madera,
penetre como un viento de música y de plata,
oh corazón, no temas, no tiembles, amor mío.
Un soplo de destino apagará la llama entre los labios
y en las barcas de estío los floridos remeros callarán para siempre.
La mano, entre las cuerdas de nobles instrumentos,
quedará y la canción, pájaro inacabado,
buscará nido en las brillantes gemas solitarias
de los desnudos cuerpos pulidos al aliento del mar y de los astros,
quietos y deslumbrantes como árboles de mármol
donde una fruta dulce y venenosa se pudre lentamente.
Yacerán sepultados en bancales de olvido
a balanza sutil del orfebre y la brújula
que guía por el sueño la flota misteriosa
y el atril y los báculos, la tralla y los arneses,
silenciosos testigos de unas sombras extintas.
Y el rubí como un diente de sangre clavado en la garganta
y el vaso que derrama el hechizo del vino
y el azul brazalete como pámpano enroscado a la carne,
el punzón y los búcaros.
Lo que un día tuvo el fuego de un instante,
eternidad proclama.
Oh corazón, oh amor, amor mío que tiemblas
solitario al rumbor del bosque que respira,
no temas.
Las puertas con su triple candado están cerradas
y aún hay vida en mis manos. Duerme dulce
hasta, que un alba púrpura selle de polvo el labio y nos lleve
flotando a los altos sitiales.
Oleo
Ediciones Agora, Madrid, 1958
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Octavio Paz : Hymne parmi les ruines / Himno entre ruinas (10/02/2017)
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