Hymne à la nuit
II
Faut-il toujours que le matin revienne ? L’empire de ce monde ne
prend-il jamais fin ? Une fatale activité engloutit les élans divins de
la Nuit qui s’approche. Ne va-t-il donc jamais, le sacrifice occulte de
l’Amour, éternellement brûler ?
La lumière a son temps, qui lui fut mesuré ; mais le royaume de la
Nuit est hors le temps et l’espace.- Et c’est l’éternité que le sommeil a
pour durée.
Sommeil sacré ! ne t’en viens pas trop rarement, durant le terrestre
labour du jour, combler de tes félicités les adeptes fidèles de la Nuit. Les
insensés uniquement te méconnaissent et ne savent point d’autre sommeil
que l’ombre que tu jettes, par compassion pour nous, au crépuscule de la
nuit évidente. Ils ne te sentent point dans le flot d’or des grappes – dans
l’huile miraculeuse de l’amandier ou dans la brune sève du pavot. Ils ne le
savent pas, que c’est toi qui nimbes ainsi le tendre sein de la vierge et nous
fais de son cœur un paradis. Ils ne pressentent pas que, te levant des
légendes anciennes, tu t’avances vers nous, ouvrant le ciel, et tu portes la
clef qui ouvre les demeures de la béatitude, silencieux messager des infinis
mystères.
Traduit de l’allemand par Armel Guerne.
In, « Novalis, Oeuvres complètes », Editions Gallimard, 1975
Du même auteur :
« Quand ce ne seront plus les nombres et les figures » / « Wenn nicht mehr Zahlen und Figuren » (01/02/2016)
« Les prés se sont recouverts de verdure… » / « Es färbte sich die Wiese grün… » (01/02/2017)
Hymnen an die nacht
II
Muss immer der Morgen wierderkommen? Ender nie des Irdischen Gewalt?
unselige Geschäftigkeit verzehrt den himmlischen Anflug der Nacht. Wird nie
der Liebe geheimes Opfer ewig brennen? Zugemessen ward dem Lichte seine
Zeit; aber zeitlos und raumlos ist der Nacht Herrschaft. - Ewig ist die Dauer
des Schlafs. Heiliger Schlaf - beglücke zu selten nicht der Nacht Geweihte in
diesem irdischen Tagewerk. Nur die Thoren verkennen dich und wissen von
keinem Schlafe, als den Schatten, den du in jener Dämmerung der wahrhaften
Nacht mitleidig auf uns wirfst. Sie fühlen dich nicht in der goldnen Flut der
Trauben - in des Mandelbaums Wunderöl, und dem braunen Safte des Mohns.
Sie Wissen nicht, dass du es bist der des zarten Mädchens Busen umschwebt
uns zum Himmel den Schoss macht - ahnden nicht, dass aus alten Geschichten
du himmelöffnend entgegentrisst und den Schlüssel trägst zu den Wohnungen
der Selingen, unendlicher Geheimnisse schweigender Bote.
Revue "Athenaeum", Berlin, 1800
Poème précédent en allemand :
Paul Celan : Fugue de mort / Todesfuge (1/12/2014)
Poème suivant en allemand :
Johann Wolfgang von Goethe : Bienvenue et adieu / Willkommen und Abschied (22/06/2015)