Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le bar à poèmes
4 janvier 2015

Boris Vian (1920 – 1959) : Le temps de vivre

boris_vian[1]

 Le temps de vivre

 

Il a dévalé la colline

Ses pas faisaient rouler les pierres

Là-haut entre les quatre murs

La sirène chantait sans joie

 

 

Il respirait l’odeur des arbres

Avec son corps comme une forge

La lumière l’accompagnait

Et lui faisait danser son ombre

 

 

Pourvu qu’ils me laissent le temps

Il sautait à travers les herbes

Il a cueilli deux feuilles jaunes

Gorgées de sève et de soleil

 

 

Les canons d’acier bleu crachaient

De courtes flammes de feu sec

Pourvu qu’ils me laissent le temps

Il est arrivé près de l’eau

 

 

Il y a plongé son visage

Il riait de joie il a bu

Pourvu qu’ils me laissent le temps

Il s’est relevé pour sauter

 

 

Pourvu qu’ils me laissent le temps

Une abeille de cuivre chaud

L’a foudroyé sur l’autre rive

Le sang et l’eau se sont mêlés

 

 

Il avait eu le temps de voir

Le temps de boire à ce ruisseau

Le temps de porter à sa bouche

Deux feuilles gorgées de soleil

 

 

Le temps d’atteindre l’autre rive

Le temps de rire aux assassins

Le temps de courir vers la femme

 

 

Il avait eu le temps de vivre.

 

1954

 

Du même auteur : 

« Je voudrais pas crever… » (04/01/2014)

Ils cassent le monde (08/04/2016)

« Je mourrai d'un cancer… » (08/04/2017)

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Le bar à poèmes
Publicité
Archives
Newsletter
100 abonnés
Publicité