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Le bar à poèmes
29 septembre 2014

Alain Jégou (1948 – 2013) : « Sans forfanterie aucune… »

Jegou-Alain_par-j

 

"J'ai été témoin / j'ai souffert / j'étais là"

Walt Whitman

 

     Sans forfanterie aucune, ni usage d’artifices ou de clichés calqués,

seulement présents dans le vif de l’action, avec juste notre fatras de peau,

de frusques et de sentiments à la con, plus une plume ou un crayon pour croquer

les traits de la situation.

     Sans la ramener bésef pour paraître plus affranchis ou cadors que nous le

sommes en réalité. Être là, morfler et essayer de témoigner. Transmettre le scoop

secoué à ceux qui ne savent pas.

     Sans micmac ni bidouillages d’esprit, genre occultisme ou bigoterie,

sur la brèche toujours, le fil de lame, à jouer les équilibristes pour rester

en surface, garder le moral loin des godasses, bien au-dessus de l’horizon

et de la flottaison.

     Sans réelle animosité, ni envie d’en découdre à tout crins, essayer de

cohabiter, coexister avec l’espace mâtin, la carcasse coincée entre deux mondes,

celui des morts d’un côté celui des vivants de l’autre, puisqu’il paraît, comme

disait le poète, que nous sommes en marge de ces deux entités.

     Sans une once de regrets, cœurs errants baladés entre deux conditions, fricotant

avec la vastitude sans jamais nous mêler des affres et turpitudes des humaines

habitudes, toujours le cul entre deux marées, l’espoir entre deux rades et la vie entre

deux dépressions.

     Sans exactitude ni certitude de soi non plus, naviguant à l’estime entre le mesquin

et le généreux, le frileux et l’impulsif, l’étriqué et l’exalté, le quiet et le sauvage,

le douillet et l’inconfortable, le convenu et l’incongru, le blême et le beau,

le zéro et l’infini...

     Toujours l'impulsion qui prime, le besoin d'éloignement. Larguer les bosses,

franchir les passes, doubler les digues, les bouées, les pointes et les caps. Fuir la

morosité, l'hostilité mesquine, les râleries et reproches, les tracasseries et anicroches,

tous les chichis et blabla énervants. Rallier le large chaque matin ou chaque marée

et se payer le luxe de voyager serein. Même dans les pires moments des foudres et

déchirements, se colleter débridé, morfler et aimer çà. Quoi de plus naturel pour un

être passionné, toujours à fleur de tripes et foncièrement fêlé?

 

 

Passe Ouest suivi de IKARIA LO 686070

Editions Apogée, 35000 Rennes, 2007  

Du même auteur :

« Coincées entre la coque et le vivier… » (07/12/2015)

Toull Lech’id (07/12/2016)

« marcher sur des chemins provisoires… » (07/12/2017)

Lorient-Keroman (07/12/2018)

« Au cul des navires... » (07/12/2019)

Pointe de 30 (07/12/2020) 

Vasière de Saint-Marc (07/12/2021)

Baie du Pouldu (07/12/2022)

Trou sud de Groix (07/12/2023)

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